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Un couple jugé pour avoir escroqué le fonds d'aide aux victimes d'attentats

Un couple de Cannois est jugé en appel pour avoir escroqué le fonds d'aide aux victimes du terrorisme en se faisant passer pour des rescapés des attentats de Paris et Nice.

François Chevalier
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François Chevalier

Journaliste spécialisé dans les affaires criminelles et les questions de sécurité sur la Côte d'Azur. François Chevalier couvre les enquêtes judiciaires et décrypte les dynamiques du grand banditisme local.

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Un couple jugé pour avoir escroqué le fonds d'aide aux victimes d'attentats

Un couple de Cannois, Sasa Damjanovic et Vera Vasic, est jugé par le tribunal de Grasse pour avoir frauduleusement obtenu des indemnisations destinées aux victimes du terrorisme. Ils sont accusés de s'être faussement déclarés présents lors des attentats de Paris en novembre 2015 et de Nice en juillet 2016, une manœuvre qui leur avait permis de percevoir 60 000 euros.

Déjà condamnés en première instance, ils ont fait appel de la décision. En situation de récidive légale, ils encourent une peine pouvant aller jusqu'à 14 ans de prison pour escroquerie aggravée au préjudice du Fonds de Garantie des Victimes des actes de Terrorisme et d'autres Infractions (FGTI).

Points Clés

  • Un couple est jugé en appel pour avoir escroqué le fonds d'indemnisation des victimes de terrorisme.
  • Ils ont perçu 60 000 euros en se faisant passer pour des victimes de l'attentat du Stade de France en 2015.
  • Une seconde tentative de fraude après l'attentat de Nice en 2016 a été déjouée.
  • Les données de leurs téléphones portables ont prouvé qu'ils n'étaient pas sur les lieux des attentats.
  • Le couple risque jusqu'à 14 ans de prison en raison de l'état de récidive légale.

Une double escroquerie au préjudice des victimes

L'affaire qui occupe le tribunal de Grasse met en lumière une fraude particulièrement choquante, exploitant la solidarité nationale mise en place pour soutenir les personnes touchées par le terrorisme. Le couple, résidant à Cannes, a mis en place un stratagème à deux reprises pour bénéficier d'aides financières auxquelles il n'avait pas droit.

L'escroquerie de Paris : 60 000 euros indûment perçus

La première fraude remonte aux attentats du 13 novembre 2015 à Paris. Sasa Damjanovic et Vera Vasic ont monté un dossier de demande d'indemnisation auprès du FGTI. Dans leur déclaration, ils affirmaient se trouver aux abords du Stade de France au moment des explosions.

Leur récit, jugé crédible à l'époque, leur a permis d'obtenir le statut de victime. Le FGTI leur a ainsi versé une somme totale de 60 000 euros, destinée à compenser le préjudice moral et psychologique supposément subi.

Le rôle du FGTI

Le Fonds de Garantie des Victimes des actes de Terrorisme et d'autres Infractions (FGTI) est un organisme chargé d'indemniser les victimes de terrorisme. Financé par une contribution prélevée sur les contrats d'assurance, il assure la réparation intégrale des préjudices subis par les victimes et leurs proches, un pilier de la solidarité nationale.

La tentative de Nice : une fraude déjouée

Quelques mois plus tard, le 14 juillet 2016, un attentat tragique frappait la Promenade des Anglais à Nice. Fin juillet de la même année, le couple a tenté de réitérer son stratagème. Ils ont déposé une nouvelle demande d'indemnisation, affirmant avoir été présents sur les lieux et avoir été bousculés dans le mouvement de panique.

Cependant, cette fois-ci, leur tentative a échoué. Au moment du dépôt de ce second dossier, Sasa Damjanovic et Vera Vasic étaient déjà dans le viseur de la justice pour leur première déclaration. Le FGTI, alerté, n'a procédé à aucun versement et a signalé les faits aux autorités compétentes, ce qui a déclenché une enquête approfondie.

L'enquête et les preuves accablantes

L'enquête menée par les services de police a rapidement permis de mettre en évidence les incohérences dans les déclarations du couple. Les investigations se sont notamment concentrées sur l'analyse de leurs données de télécommunication, qui se sont révélées être une preuve irréfutable de leur mensonge.

La téléphonie mobile au cœur des investigations

L'exploitation des données de leurs téléphones portables a été un élément déterminant. Les enquêteurs ont pu établir avec certitude que le couple ne se trouvait ni à Paris le 13 novembre 2015, ni à Nice le 14 juillet 2016. Au moment de l'attentat de Nice, leurs téléphones ont été localisés à Cannes, leur lieu de résidence, à plusieurs dizaines de kilomètres de la Promenade des Anglais.

Selon les enquêteurs, la géolocalisation des téléphones est devenue un outil essentiel pour vérifier les déclarations des demandeurs d'indemnisation et lutter contre les tentatives de fraude qui portent atteinte à la mémoire des victimes et à la solidarité nationale.

Confrontés à ces preuves matérielles, Sasa Damjanovic et Vera Vasic ont fini par passer aux aveux. Ils ont reconnu avoir menti sur leur présence lors des deux attentats dans le but unique de percevoir des indemnités.

Les conséquences judiciaires d'une fraude aggravée

Le parcours judiciaire du couple n'est pas nouveau. Ils avaient déjà été jugés en première instance pour ces faits. Le 8 décembre 2016, le tribunal les avait reconnus coupables d'escroquerie aggravée. Sasa Damjanovic avait été condamné à une peine de six ans de prison ferme, tandis que sa compagne, Vera Vasic, avait écopé de trois ans d'emprisonnement.

En plus des peines de prison, le tribunal avait ordonné au couple de rembourser les sommes perçues. Ils avaient été condamnés solidairement à verser 30 000 euros chacun au FGTI, qui s'était constitué partie civile dans cette affaire.

Insatisfaits de ce jugement, ils avaient décidé de faire appel, ce qui conduit au procès actuel devant le tribunal de Grasse. Cette nouvelle audience réexamine l'ensemble du dossier.

Le statut de récidive légale

La situation du couple est juridiquement complexe. Le fait d'avoir commis une nouvelle infraction (la tentative de fraude après l'attentat de Nice) alors qu'ils étaient déjà sous le coup d'une enquête pour la première les place en état de récidive légale. Ce statut constitue une circonstance aggravante qui expose les prévenus à des peines beaucoup plus lourdes.

En conséquence, la peine maximale encourue par Sasa Damjanovic et Vera Vasic est de 14 ans d'emprisonnement. Le jugement en appel devra déterminer la peine juste et proportionnée à la gravité des faits, qui ont non seulement causé un préjudice financier à un fonds de solidarité, mais ont également été perçus comme une offense à la mémoire des véritables victimes.