Un homme de 30 ans, accusé d'avoir commis une agression sexuelle sur une touriste de 16 ans dans un tramway à Nice, a été relaxé par le tribunal. Les juges ont estimé que les faits n'étaient pas suffisamment caractérisés pour retenir cette qualification. Il a cependant été condamné à une peine de prison pour le port d'un couteau, une infraction constatée lors de son interpellation.
L'incident, survenu le 11 août dernier, a mis en lumière les difficultés juridiques liées à la caractérisation des agressions sexuelles dans les espaces publics, notamment dans les transports en commun. La décision du tribunal repose sur une analyse détaillée des preuves, y compris les images de vidéosurveillance.
Déroulement des faits et interpellation rapide
Les événements se sont produits en pleine saison estivale, le 11 août vers 21 h 50. Une jeune touriste de nationalité étrangère, âgée de 16 ans, se trouvait avec ses parents sur le quai du tramway. Au moment de monter dans la rame, elle a croisé un homme de 30 ans, d'origine ukrainienne, qui en descendait.
C'est à cet instant précis que le contact a eu lieu. La jeune fille a affirmé que l'homme lui avait touché le sexe. Le père de l'adolescente, témoin direct de la scène, a immédiatement réagi en interpellant verbalement l'individu. Il a également eu le réflexe de prendre une photographie de lui avant de contacter les forces de l'ordre.
Grâce à la réactivité du père et à la description fournie, une patrouille de police a pu localiser et interpeller le suspect peu de temps après les faits, non loin de la station de tramway. Lors de son arrestation, les agents ont découvert qu'il était porteur d'un couteau.
Un taux d'alcoolémie significatif
Lors de son interpellation, l'homme présentait un taux d'alcoolémie de près d'un gramme par litre de sang. Selon la législation, l'état d'ivresse est considéré comme une circonstance aggravante dans de nombreuses infractions pénales.
Une audience marquée par des versions opposées
Présenté devant le tribunal, le prévenu a contesté la version de la victime et de sa famille. Il a nié toute intention sexuelle dans son geste, plaidant pour un contact accidentel et involontaire. « J'étais dans le tramway, je parlais au téléphone », a-t-il expliqué à la barre, ajoutant : « Je ne dis pas que je ne l’ai pas touchée par inadvertance. »
Son argumentation reposait sur le contexte de l'incident : un croisement rapide dans l'embrasure d'une porte de tramway, un lieu souvent sujet à des bousculades. L'homme, présent en France depuis huit ans, possédait déjà un casier judiciaire pour des faits de vol.
La vision du ministère public
La procureure, Noémie Orihuela, a soutenu une version bien différente des faits. Elle a décrit un geste délibéré, qualifiant les faits d'« extrêmement désagréables ». Pour le parquet, la main de l'accusé « est passée dans l’entrejambe de la victime, remontant ensuite vers la poitrine ».
« Il n’y a pas lieu de laisser passer une quelconque insécurité dans les transports en commun, et où que ce soit », a martelé la représentante du ministère public, soulignant l'importance de sanctionner de tels actes pour préserver l'ordre public.
En conséquence, la procureure avait requis une peine sévère : quinze mois de prison avec maintien en détention, une inscription au Fichier des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (Fijais), ainsi que des interdictions de contact avec des mineurs et une interdiction du territoire français pour une durée de dix ans.
La défense conteste l'interprétation des images
L'avocat de la défense, Me Jérémy Jacquet, a concentré sa plaidoirie sur l'analyse des preuves matérielles, notamment l'enregistrement de la vidéosurveillance. S'il n'a pas nié le contact physique, il a fermement contesté l'interprétation qu'en a faite l'accusation.
Selon lui, la version d'une main remontant vers la poitrine de la victime relevait de la « surinterprétation ». Il a mis en avant le rapport du policier ayant visionné les images, qui évoquait « un contact dans la zone du bas ventre », sans mentionner de mouvement ascendant. Cette nuance était au cœur de sa stratégie de défense.
Qu'est-ce qu'une agression sexuelle en droit français ?
L'article 222-22 du Code pénal définit l'agression sexuelle comme toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise. La difficulté pour les tribunaux réside souvent dans la preuve de l'intentionnalité de l'auteur et de l'absence de consentement de la victime, surtout lorsque les gestes sont brefs et ambigus.
L'avocat a posé une question directe au tribunal, qui a probablement pesé dans la délibération : « Un contact dans la zone du bas-ventre est-il une agression sexuelle ? » Cette interrogation soulève le problème de la caractérisation juridique d'un geste qui, sans preuve d'intentionnalité, peut être interprété de différentes manières.
Le verdict du tribunal : relaxe et condamnation
Après en avoir délibéré, le tribunal a rendu sa décision. Concernant l'accusation d'agression sexuelle, le prévenu a été relaxé. Les juges ont conclu que les faits n'étaient pas suffisamment caractérisés pour retenir cette qualification pénale. Cela signifie que les éléments du dossier n'ont pas permis d'établir avec certitude l'intentionnalité sexuelle du geste, laissant place au doute.
En revanche, l'homme n'a pas quitté le tribunal libre de toute condamnation. Les faits de port d'arme prohibé (le couteau) ont été retenus contre lui. Le tribunal l'a condamné pour cette infraction, en état de récidive légale, à une peine de trois mois de prison ferme.
Ce jugement illustre la complexité des affaires de violences sexuelles et sexistes, où la parole de la victime est confrontée à la version de l'accusé, et où les preuves matérielles sont scrutées pour établir l'intentionnalité. La relaxe pour l'agression sexuelle ne signifie pas que le contact n'a pas eu lieu, mais que le tribunal n'a pas eu la conviction qu'il constituait, au sens strict de la loi, une infraction à caractère sexuel.