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Affaire Omar Raddad : Le procureur de Nice estime le dossier clos

Le procureur de la République de Nice a affirmé que l'affaire Omar Raddad était "finie" sur le plan judiciaire, estimant que toutes les expertises ont été faites.

François Chevalier
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François Chevalier

Journaliste spécialisé dans les affaires criminelles et les questions de sécurité sur la Côte d'Azur. François Chevalier couvre les enquêtes judiciaires et décrypte les dynamiques du grand banditisme local.

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Affaire Omar Raddad : Le procureur de Nice estime le dossier clos

Le procureur de la République de Nice, Jean-Michel Prêtre, a déclaré que l'affaire Omar Raddad était judiciairement terminée, affirmant que toutes les expertises possibles avaient été menées. Cette déclaration marque une étape significative dans l'un des dossiers criminels les plus médiatisés de France, bien que la défense conteste cette conclusion et continue de clamer l'innocence du jardinier marocain.

Points Clés

  • Le procureur de la République de Nice, Jean-Michel Prêtre, considère l'affaire Omar Raddad comme "finie" sur le plan des investigations.
  • Il soutient que toutes les expertises judiciaires réalisables ont déjà été effectuées.
  • La défense, menée par Maître Sylvie Noachovitch, reste convaincue de l'innocence d'Omar Raddad et demande de nouvelles analyses ADN.
  • Omar Raddad a été condamné en 1994 pour le meurtre de Ghislaine Marchal, avant de bénéficier d'une grâce présidentielle partielle en 1996.

La position ferme du parquet de Nice

Dans une déclaration sans équivoque, le procureur de la République de Nice, Jean-Michel Prêtre, a exprimé sa conviction que le dossier judiciaire concernant Omar Raddad a atteint son terme. Selon lui, la justice a exploré toutes les pistes envisageables pour faire la lumière sur le meurtre de Ghislaine Marchal en 1991.

"Pour moi l’affaire est finie, je ne me sens pas dans une situation où l’on pourrait dire que la justice n’a pas fait son travail", a-t-il affirmé. Cette prise de position intervient après de nouvelles demandes d'investigation de la part de la défense, notamment concernant des traces ADN.

Une démarche jugée "médiatique"

Le procureur a également qualifié la démarche d'Omar Raddad et de son avocate, Maître Sylvie Noachovitch, de plus "médiatique que judiciaire". Tout en disant comprendre leur détermination, il a souligné qu'aucun nouvel élément probant n'était apparu pour remettre en cause la condamnation initiale.

"Je ne vois pas ce qui aurait pu être fait de plus", a insisté Jean-Michel Prêtre, rappelant que la vérité judiciaire demeure la condamnation du jardinier marocain par une cour d'assises.

Il a néanmoins informé la défense de son droit d'exercer un recours auprès du procureur général d'Aix-en-Provence, une voie qui pourrait potentiellement mener à de nouveaux actes d'instruction si elle était jugée recevable.

Retour sur une affaire emblématique

L'affaire Omar Raddad est l'une des énigmes judiciaires les plus célèbres en France. Elle débute le 24 juin 1991 avec la découverte du corps de Ghislaine Marchal, une riche veuve, dans la cave de sa villa à Mougins, sur la Côte d'Azur. La scène de crime est marquée par une inscription tracée avec le sang de la victime : "Omar m'a tuer".

L'inscription au cœur du dossier

La phrase "Omar m'a tuer", avec sa faute de grammaire, est devenue le symbole de l'affaire. La défense a toujours soutenu que Ghislaine Marchal, une femme cultivée, n'aurait jamais commis une telle erreur d'accord, suggérant que l'inscription a été réalisée par une autre personne pour incriminer le jardinier.

Condamnation et grâce présidentielle

Les soupçons se portent rapidement sur le jardinier de la victime, Omar Raddad. Malgré ses dénégations constantes, il est condamné en 1994 à 18 ans de réclusion criminelle pour meurtre. Son cas a suscité un intense débat public, alimenté par des doutes sur la solidité des preuves et des accusations de racisme.

En 1996, le président Jacques Chirac lui accorde une grâce présidentielle partielle, qui entraîne sa libération en 1998. Cependant, cette grâce n'annule pas sa condamnation et ne l'innocente pas aux yeux de la justice.

La bataille de l'ADN : espoirs et déceptions

Depuis sa libération, Omar Raddad et ses avocats successifs n'ont cessé de se battre pour obtenir la révision de son procès. Leur principal espoir repose sur les progrès de la science, et plus particulièrement sur les analyses ADN.

Au fil des ans, plusieurs expertises ont été menées sur les scellés, notamment les portes où figurait l'inscription sanglante. Ces analyses ont révélé la présence de plusieurs profils génétiques masculins qui n'appartiennent pas à Omar Raddad.

Qu'est-ce qu'une procédure de révision ?

En droit français, la révision d'une condamnation pénale est une procédure exceptionnelle. Elle ne peut être demandée que si un "fait nouveau" ou un "élément inconnu" au moment du procès est découvert, de nature à faire naître un doute sur la culpabilité du condamné. La découverte de nouvelles traces ADN peut constituer un tel fait.

Le revers de février 2018

Un développement important est survenu le 20 février 2018. Un homme, dont le profil génétique correspondait très partiellement à l'une des traces retrouvées sur la scène de crime, a été interrogé par les enquêteurs. Cependant, après vérification, cet individu a été totalement mis hors de cause, anéantissant une piste que la défense jugeait prometteuse.

Cet épisode a renforcé la position du parquet de Nice, qui estime que les expertises ADN, loin de disculper Omar Raddad, n'ont pas permis d'identifier un autre coupable de manière certaine.

Un combat qui continue malgré tout

Malgré la déclaration du procureur Prêtre, la défense d'Omar Raddad refuse de baisser les bras. Pour Maître Sylvie Noachovitch, l'affaire est loin d'être close.

S'exprimant auprès du journal Le Monde, elle a réaffirmé sa conviction et sa détermination à poursuivre le combat judiciaire.

"Cette affaire n’est pas clôturée. Pour ma part, je reste convaincue de l’innocence d’Omar Raddad", a-t-elle déclaré, indiquant qu'elle espérait toujours obtenir de nouvelles expertises ADN plus poussées.

Le mystère entourant le meurtre de Ghislaine Marchal reste donc entier. Plus de trente ans après les faits, l'affaire continue de diviser l'opinion publique et de symboliser les possibles erreurs du système judiciaire. Pour Omar Raddad, aujourd'hui âgé de plus de 60 ans, la quête de la reconnaissance de son innocence est le combat de toute une vie, un combat qui se heurte désormais à la position ferme de la justice niçoise.