Face à la prolifération de l'usage détourné du protoxyde d'azote, la ville de Nice a décidé de renforcer ses mesures. À partir du 1er octobre 2025, la vente de ce gaz aux particuliers sera totalement interdite sur son territoire. Cette décision locale s'accompagne d'un appel pressant du maire, Christian Estrosi, en direction de l'État pour une législation nationale plus stricte.
Les points essentiels
- Interdiction totale de la vente de protoxyde d'azote aux particuliers à Nice à compter du 1er octobre 2025.
- Seuls les professionnels pourront acheter ce produit sur présentation d'un justificatif.
- Cette mesure locale fait suite à un précédent arrêté interdisant la consommation et la détention sur la voie publique.
- Le maire de Nice, Christian Estrosi, demande une intervention de l'État pour lutter contre ce phénomène à l'échelle nationale.
Un fléau visible dans les rues de la ville
Les rues de plusieurs quartiers de Nice sont devenues le théâtre d'un spectacle désolant. Chaque matin, les agents de la propreté et les résidents découvrent des centaines de petites cartouches métalliques argentées et de bonbonnes plus volumineuses jonchant les trottoirs, les parcs et les plages. Ces déchets sont la trace visible de la consommation croissante de protoxyde d'azote, plus connu sous le nom de "gaz hilarant".
Ce phénomène, loin d'être anecdotique, génère une exaspération grandissante chez les habitants, confrontés à une dégradation de leur cadre de vie. Malgré un premier arrêté municipal pris l'été dernier pour interdire la consommation et la détention de ce produit sur l'espace public, le problème persiste et semble même s'amplifier.
Qu'est-ce que le protoxyde d'azote ?
Le protoxyde d'azote (N₂O) est un gaz à usage légal, principalement utilisé en cuisine comme gaz propulseur dans les siphons à chantilly, ou dans le domaine médical pour ses propriétés anesthésiantes et analgésiques. Cependant, son usage a été massivement détourné à des fins récréatives pour ses effets psychoactifs de courte durée, provoquant euphorie et distorsions sensorielles.
Un cadre légal insuffisant
Jusqu'à récemment, la vente de protoxyde d'azote était peu réglementée. Une loi de 2021 a interdit sa vente aux mineurs, mais la facilité d'accès pour les adultes, notamment via des commerces de proximité ou sur internet, a permis au phénomène de prospérer. Les mesures locales, comme celles prises à Nice, tentent de combler ce que beaucoup considèrent comme un vide juridique.
Nice durcit le ton avec une interdiction de vente
Face à l'inefficacité relative des premières mesures et à l'ampleur du problème, la municipalité de Nice a décidé de passer à une étape supérieure. Une nouvelle réglementation a été adoptée pour s'attaquer directement à la source d'approvisionnement.
À partir du 1er octobre 2025, la vente de protoxyde d'azote sera formellement interdite à toute personne non professionnelle sur l'ensemble du territoire communal. Cette interdiction concerne tous les points de vente, des supermarchés aux épiceries de nuit.
Qui pourra encore en acheter ?
La nouvelle mesure est claire : seuls les professionnels pourront se procurer du protoxyde d'azote. Pour cela, ils devront présenter un justificatif prouvant que l'achat est lié à leur activité professionnelle. Cette disposition vise à garantir l'accès au produit pour ses usages légitimes, comme la restauration ou certaines applications industrielles, tout en bloquant l'accès au grand public pour un usage récréatif.
Un danger pour les centres de tri
Au-delà de la pollution visuelle, les bonbonnes de protoxyde d'azote représentent un risque sécuritaire majeur. Lorsqu'elles ne sont pas correctement triées et se retrouvent dans les filières d'ordures ménagères, elles peuvent exploser au contact de la chaleur dans les incinérateurs, provoquant des dégâts matériels importants et mettant en danger le personnel des centres de traitement des déchets.
Des risques sanitaires graves et souvent méconnus
La banalisation de la consommation de "proto" masque des dangers bien réels pour la santé des utilisateurs, en particulier chez les jeunes qui en sont les principaux consommateurs. Les effets ne se limitent pas à quelques secondes d'euphorie.
L'inhalation de ce gaz peut entraîner des conséquences immédiates comme des vertiges, des maux de tête, des nausées, mais aussi des risques d'asphyxie par manque d'oxygène, de perte de connaissance ou de brûlures par le froid au contact du gaz.
Des atteintes neurologiques sévères
Une consommation régulière et à forte dose peut provoquer des complications neurologiques graves et parfois irréversibles. Le protoxyde d'azote inhibe l'action de la vitamine B12, essentielle au bon fonctionnement du système nerveux. Les conséquences peuvent inclure :
- Des troubles de la marche et de l'équilibre.
- Une faiblesse musculaire dans les membres inférieurs.
- Des troubles de la sensibilité et des fourmillements.
- Dans les cas les plus sévères, une myélopathie pouvant conduire à une paralysie.
Des troubles cardiovasculaires, comme des thromboses ou des troubles du rythme cardiaque, ainsi que des effets psychologiques (anxiété, confusion, troubles psychotiques) sont également documentés.
L'appel à une réponse nationale
Pour le maire de Nice, Christian Estrosi, la lutte contre ce fléau ne peut reposer uniquement sur les épaules des municipalités. Il estime que les actions locales, bien que nécessaires, atteignent leurs limites face à un trafic organisé et une disponibilité du produit qui dépasse les frontières de la ville.
« Nous avons tout tenté à l’échelle locale », a déclaré le maire, soulignant que les campagnes de prévention, les contrôles de police et les opérations de nettoyage ne suffisent plus à endiguer le phénomène.
Christian Estrosi appelle donc le gouvernement à prendre ses responsabilités en instaurant une loi nationale ferme. Selon lui, seule une législation claire, assortie de sanctions dissuasives pour les vendeurs et les trafiquants, permettra de casser les réseaux de distribution qui se sont développés à grande vitesse sur tout le territoire.
L'enjeu est de protéger la santé publique, en particulier celle des plus jeunes, et de garantir la sécurité et la tranquillité dans l'espace public. L'initiative niçoise pourrait ainsi servir de catalyseur pour une prise de conscience et une action politique à plus grande échelle.