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Incident à l'aéroport de Nice : Nouvelair sous pression politique

Un incident grave à l'aéroport de Nice, où une collision a été évitée de justesse, place la compagnie Nouvelair au cœur d'une tempête politique et médiatique.

Benoît Fournier
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Benoît Fournier

Journaliste spécialisé dans les questions de transport, de logistique et de sécurité. Benoît Fournier couvre les incidents, les innovations et les politiques publiques qui façonnent le secteur des transports aériens, maritimes et terrestres.

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Incident à l'aéroport de Nice : Nouvelair sous pression politique

Un incident grave survenu le 21 septembre à l'aéroport de Nice Côte d'Azur, où une collision entre deux avions a été évitée de justesse, a déclenché une vive controverse politique. Un avion de la compagnie tunisienne Nouvelair, en phase d'atterrissage, s'est retrouvé sur une trajectoire de collision avec un appareil d'EasyJet qui s'apprêtait à décoller.

Alors que le Bureau d'Enquêtes et d'Analyses (BEA) a ouvert une enquête, des voix politiques s'élèvent pour demander la suspension des vols de Nouvelair en France, tandis que d'autres appellent à la prudence et dénoncent une récupération politique.

Points Clés

  • Un avion Nouvelair a failli entrer en collision avec un avion EasyJet sur le tarmac de l'aéroport de Nice le 21 septembre.
  • Le député Éric Ciotti a demandé la suspension immédiate des autorisations de vol de la compagnie en France.
  • Le député Riadh Jaidane défend Nouvelair, invoquant l'erreur humaine possible et des conditions météo difficiles.
  • Le BEA a confirmé que l'avion de Nouvelair s'était trompé de piste, une enquête est en cours.
  • La gouvernance de la compagnie est fragilisée par des affaires judiciaires visant son actionnaire majoritaire.

Déroulé de l'incident et ouverture de l'enquête

Le dimanche 21 septembre, une situation critique s'est produite sur les pistes de l'aéroport de Nice. Un Airbus de la compagnie Nouvelair, en provenance de Tunisie, a engagé sa procédure d'atterrissage sur une piste déjà occupée par un avion d'EasyJet, prêt au décollage. L'intervention rapide des contrôleurs aériens et des pilotes a permis d'éviter une catastrophe.

Suite à cet événement, qualifié d'incident grave, le Bureau d'Enquêtes et d'Analyses pour la sécurité de l'aviation civile (BEA) a immédiatement été saisi. Les enquêteurs ont pour mission de déterminer les causes exactes de cette quasi-collision et d'établir les responsabilités.

Le rôle du BEA

Le BEA est l'autorité française responsable des enquêtes de sécurité dans l'aviation civile. Ses investigations sont techniques et visent non pas à déterminer des fautes ou des responsabilités juridiques, mais à comprendre les événements pour formuler des recommandations de sécurité afin d'éviter que de tels incidents ne se reproduisent.

Les premiers éléments communiqués par le BEA confirment que l'équipage de Nouvelair s'est aligné sur la mauvaise piste lors de son approche. L'enquête devra clarifier si cette erreur est due à une faille humaine, à un problème technique, aux conditions météorologiques ou à une combinaison de facteurs.

Une forte réaction politique et des appels à la sanction

L'incident a rapidement pris une dimension politique. Le député Éric Ciotti a adressé un courrier à Sébastien Lecornu, ministre des Armées, pour exiger des mesures fermes et immédiates. Il demande la suspension de toutes les autorisations de vol de Nouvelair sur le territoire français.

« Cet incident, qui aurait pu causer une catastrophe aérienne majeure à Nice, constitue un signal d’alarme que nous ne pouvons ignorer », a écrit le parlementaire, qui réclame une enquête approfondie sur les pratiques de sécurité et de formation de la compagnie.

Pour Éric Ciotti, la reprise des activités de Nouvelair en France devrait être conditionnée à l'obtention de garanties strictes en matière de sécurité. Cette prise de position met une pression considérable sur la compagnie aérienne tunisienne.

Un personnel sous le choc

Selon des témoignages recueillis, des agents de la Direction Générale de l'Aviation Civile (DGAC) à Nice se sont dits profondément choqués par l'événement. Certains pointent un manque d'effectifs et un malaise social qui pourraient, selon eux, affecter la sécurité des opérations aéroportuaires.

La défense de Nouvelair face aux accusations

Face à cette offensive politique, la compagnie a trouvé un défenseur en la personne de Riadh Jaidane, député représentant les Tunisiens résidant en France. Dans un communiqué officiel, il a appelé à ne pas tirer de « conclusions hâtives » avant la fin de l'enquête du BEA.

M. Jaidane a souligné plusieurs points pour défendre la compagnie :

  • L'incident s'est produit dans des « conditions météorologiques extrêmes ».
  • « L'erreur humaine peut survenir dans n'importe quelle compagnie », a-t-il insisté.
  • Nouvelair dispose de toutes les certifications internationales de sécurité requises pour opérer en Europe.
  • La compagnie a déjà engagé des mesures préventives en interne suite à l'incident.

Le député a également dénoncé ce qu'il qualifie de « récupération politique » et une « vague de spéculations médiatiques » qui porteraient préjudice à la compagnie avant même que les faits ne soient établis par les experts.

Un contexte de gouvernance troublé pour la compagnie

Au-delà de cet incident, Nouvelair évolue dans un contexte économique et judiciaire complexe. La gouvernance de la compagnie est en effet fragilisée par la situation de son actionnaire majoritaire, le groupe Tunisia Travel Service (TTS).

Séquestre judiciaire et affaires de corruption

Le groupe TTS est actuellement placé sous séquestre judiciaire en Tunisie. Plusieurs de ses actionnaires sont visés par des enquêtes pour des faits de corruption. Parmi eux figure Belhassen Trabelsi, beau-frère de l'ancien président tunisien Ben Ali, qui est recherché par Interpol et a récemment été condamné par la justice tunisienne.

Cette instabilité au sommet de l'actionnariat soulève des questions. Un lanceur d'alerte français, spécialiste du secteur aéronautique, a confié à Nice-Matin que cette situation pourrait avoir des répercussions sur le moral et les conditions de travail du personnel, et interroge sur la capacité de la compagnie à maintenir une conformité rigoureuse avec les standards de sécurité européens.

L'enquête du BEA sera donc déterminante, non seulement pour éclaircir les circonstances de l'incident du 21 septembre, mais aussi pour évaluer la fiabilité globale de Nouvelair dans un contexte de forte pression politique et de difficultés internes.