Alors que la ville voisine d'Antibes est devenue le principal foyer de chikungunya en France métropolitaine avec plus d'une centaine de cas, Nice intensifie ses mesures de prévention pour éviter une propagation. Malgré une densité de population supérieure, la capitale azuréenne ne compte pour l'instant que quelques cas isolés, une situation que les autorités sanitaires attribuent à une stratégie de lutte proactive contre le moustique tigre.
La municipalité niçoise, en collaboration avec l'Agence Régionale de Santé (ARS), a déployé un arsenal de mesures depuis le début de l'été. Ce plan vise à contrôler la population du moustique vecteur de la maladie et à sensibiliser les habitants aux gestes essentiels pour limiter les risques de transmission.
Points Clés
- Antibes est le principal foyer de chikungunya en France métropolitaine avec 103 cas recensés.
- Nice, bien que proche et plus dense, ne rapporte que 6 cas isolés et aucun foyer de transmission actif.
- Un plan de prévention ambitieux a été mis en place à Nice dès juin, incluant pièges, surveillance par drone et sensibilisation.
- Les autorités sanitaires estiment que le risque de transmission restera élevé pendant encore un mois.
Une situation contrastée dans les Alpes-Maritimes
La situation épidémiologique dans les Alpes-Maritimes présente un contraste saisissant. D'un côté, Antibes fait face à une circulation active du virus du chikungunya, avec 103 cas confirmés, ce qui en fait l'épicentre de l'épidémie sur le territoire national. De l'autre, Nice, située à seulement une trentaine de kilomètres, semble pour l'instant largement préservée.
Les chiffres officiels au 23 septembre faisaient état de seulement six cas détectés à Nice, tous considérés comme indépendants les uns des autres. Cette situation interpelle, notamment car la densité de population à Nice est plus de deux fois supérieure à celle d'Antibes, ce qui pourrait en théorie favoriser une propagation plus rapide du virus.
« C'est un peu la loi du hasard. Au départ, la personne infestée, pourquoi arrive-t-elle aux Hameaux de Saint-Claude à Antibes ? Cela démarre forcément d’un endroit. » - Jean Leonetti, Maire d'Antibes Juan-les-Pins
Cette déclaration du maire d'Antibes souligne le rôle de l'aléa dans le déclenchement d'un foyer épidémique. Un cas importé dans une zone où le moustique tigre est présent peut suffire à amorcer une chaîne de transmission locale si les conditions sont réunies.
La stratégie de prévention massive de Nice
Si le hasard a pu jouer un rôle, la faible prévalence du chikungunya à Nice ne doit rien à la chance. La ville a mis en œuvre une stratégie de lutte préventive rigoureuse bien avant que la situation à Antibes ne s'aggrave. Piloté par son Agence de sécurité sanitaire et environnementale, ce plan a été activé dès le mois de juin.
Le moustique tigre, vecteur principal
Le chikungunya est une maladie virale transmise à l'homme par la piqûre de moustiques infectés, principalement du genre Aedes. En France métropolitaine, le principal vecteur est l'Aedes albopictus, plus connu sous le nom de moustique tigre. La lutte contre ce moustique est donc la clé de la prévention.
La municipalité niçoise a déployé plusieurs dispositifs sur son territoire pour surveiller et réduire la population de moustiques. Ces actions concrètes forment un maillage de défense contre la prolifération du vecteur.
Des outils de surveillance et de lutte
La stratégie de Nice repose sur une combinaison de technologies et d'actions sur le terrain. Voici les principales mesures mises en place :
- Installation de pièges pondoirs : 66 pièges passifs ont été installés dans des zones jugées stratégiques, notamment les quartiers les plus touchés par la présence du moustique et à proximité des lieux accueillant des populations vulnérables comme les EHPAD et les crèches.
- Surveillance par drones : Des survols par drone sont effectués pour repérer les gîtes larvaires potentiels, comme les eaux stagnantes difficiles d'accès sur les toits ou dans les propriétés privées.
- Gestion des eaux stagnantes : Une campagne de sensibilisation a été menée pour encourager les habitants à éliminer toutes les sources d'eau stagnante. De plus, du sable est mis à disposition dans les cimetières pour remplacer l'eau dans les coupelles de fleurs, un gîte larvaire fréquent.
- Pièges innovants : En complément des pièges pondoirs classiques, des systèmes de suivi de population plus sophistiqués sont testés pour mieux comprendre la dynamique du moustique.
Jérôme Raibaut, directeur adjoint de l'ARS des Alpes-Maritimes, confirme l'efficacité de ces dispositifs : « Les pièges pondoirs sont très utiles pour surveiller l’entrée en activité du moustique et quelle espèce. »
Le chikungunya : transmission, symptômes et risques
Le chikungunya se transmet d'une personne infectée à une personne saine par l'intermédiaire d'une piqûre de moustique tigre. Le moustique pique une personne porteuse du virus, s'infecte, puis transmet le virus lors d'une piqûre ultérieure.
Les symptômes apparaissent généralement 4 à 7 jours après la piqûre et incluent une forte fièvre, des maux de tête et, surtout, des douleurs articulaires intenses et souvent invalidantes, qui peuvent persister plusieurs semaines voire plusieurs mois.
Un faible taux de mortalité
Bien que ses symptômes puissent être très handicapants, le chikungunya est rarement mortel. Selon les données sanitaires, le taux de mortalité de la maladie est estimé à seulement 0,07 % des cas. Les complications graves touchent principalement les personnes très âgées ou celles souffrant de maladies chroniques préexistantes.
Il n'existe pas de traitement antiviral spécifique contre le chikungunya. La prise en charge est symptomatique et vise à soulager la fièvre et les douleurs avec des médicaments analgésiques et anti-inflammatoires.
Une vigilance maintenue pour les semaines à venir
Malgré les résultats encourageants de sa politique de prévention, la ville de Nice ne baisse pas la garde. Les autorités sanitaires estiment que la période de risque n'est pas terminée. La circulation du moustique tigre reste active tant que les températures ne baissent pas de manière significative.
« Nous estimons qu’il reste un mois à risques avant une vraie baisse des températures », prévient Olivier Brahic, directeur adjoint de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur. Il ajoute qu'il y a « forcément des cas non recensés », ce qui incite à une prudence accrue.
Les déplacements quotidiens de population entre Antibes et Nice constituent un facteur de risque non négligeable. Une personne infectée et asymptomatique pourrait se faire piquer à Nice et ainsi initier une chaîne de transmission locale. C'est pourquoi la détection précoce des cas et la rapidité d'intervention autour de ces cas sont cruciales.
Pour renforcer la coordination, la municipalité niçoise a organisé un Conseil Local de Santé le 24 septembre, réunissant experts, professionnels de santé et acteurs locaux. L'objectif est de maintenir un haut niveau de mobilisation et d'adapter en continu la stratégie de lutte. Comme le résume le maire d'Antibes, « le match n’est pas terminé ».