L'annexion du Comté de Nice à la France en 1860, en échange d'un soutien militaire à l'Italie, a marqué un tournant majeur dans l'histoire de la région. Ce rattachement, loin de faire l'unanimité, a provoqué des divisions profondes au sein de la population niçoise, entraînant exils et révoltes, et forgeant une identité culturelle unique, mêlant héritages français et racines italiennes.
Points Clés
- En 1860, Nice est rattachée à la France suite à un accord avec Napoléon III.
- Un quart de la population niçoise s'est exilée en Italie, refusant la francisation.
- La répression des Vêpres niçoises en 1871 a mis fin au rêve italien.
- Cet épisode a renforcé une identité niçoise distinctive, entre deux cultures.
Un Rattachement Controversé et Ses Répercussions
Le 24 mars 1860, le traité de Turin est signé, officialisant le rattachement du Comté de Nice et de la Savoie à la France. Cet accord, négocié par Napoléon III et le royaume de Sardaigne, prévoyait une aide militaire française pour l'unification italienne. Cependant, la décision de céder Nice à la France a suscité une forte opposition locale.
Le plébiscite organisé en avril 1860, censé légitimer cette annexion, a été contesté par de nombreux historiens. La campagne en faveur du « oui » à la France était intense, avec une forte présence militaire française et une restriction des libertés d'expression pour les partisans de l'Italie. Malgré ces controverses, les résultats officiels ont montré un soutien écrasant à l'intégration française.
Chiffre Clé
Environ un quart de la population niçoise, refusant l'annexion et la politique de francisation, a choisi de s'exiler en Italie, principalement vers Turin ou Gênes. Ce mouvement est connu sous le nom d'« émigration niçoise ».
La Francisation et la Réponse Locale
Après l'annexion, une politique de francisation a été mise en œuvre. Cette politique visait à intégrer pleinement Nice à la France. Elle s'est traduite par plusieurs mesures concrètes. Par exemple, la presse italienne a été interdite. L'usage de la langue niçoise, variante de l'occitan, a été marginalisé au profit du français dans l'administration et l'éducation.
Ces changements ont généré un sentiment de trahison et de perte d'identité chez une partie des Niçois. Beaucoup se sentaient déracinés et opprimés par cette nouvelle administration. La résistance à cette francisation a pris diverses formes, allant de l'exil volontaire à des manifestations plus directes.
Selon l'historien Henri Courrière, « L'annexion de 1860 n'a pas été une intégration sans heurts, mais un processus complexe, marqué par des résistances et des recompositions identitaires profondes. »
Le Cas de Giuseppe Garibaldi
Giuseppe Garibaldi, figure emblématique de l'unification italienne et enfant de Nice, symbolise cette opposition. Il a refusé de reconnaître l'annexion de sa ville natale à la France. Profondément attaché à ses racines italiennes, il a choisi l'exil sur l'île de Caprera plutôt que d'accepter ce qu'il considérait comme une trahison. Son parcours illustre la douleur et la division ressenties par de nombreux Niçois de l'époque.
Contexte Historique
Le Comté de Nice avait une longue histoire sous domination sarde, et sa culture était fortement imprégnée d'influences italiennes. Le changement de souveraineté en 1860 a donc été perçu comme une rupture brutale par une partie de la population.
Les Vêpres Niçoises de 1871 : Une Révolte Écrasée
La colère accumulée par les Niçois a finalement éclaté en février 1871. Cet événement est connu sous le nom des Vêpres niçoises. Des milliers de personnes sont descendues dans les rues. Elles scandaient des slogans pro-italiens tels que « Vive Nice, vive l’Italie ! » et « Nice à l’Italie ! ».
Cette révolte populaire fut violemment réprimée par l'armée française. Les forces de l'ordre ont agi avec fermeté pour restaurer l'ordre. L'échec de cette insurrection a marqué la fin des espoirs de retour à l'Italie pour la plupart des Niçois. Il a aussi symbolisé la consolidation de l'autorité française sur le territoire.
- Février 1871 : Début des Vêpres niçoises.
- Revendications : Rattachement à l'Italie et opposition à la francisation.
- Répression : Intervention de l'armée française pour étouffer le mouvement.
- Conséquence : Fin du mouvement irrédentiste niçois et renforcement de l'intégration française.
L'Héritage d'une Identité Unique
Malgré la répression et l'intégration progressive à la France, cet épisode douloureux a eu un impact durable. Il a paradoxalement renforcé une identité locale unique. Nice a forgé une culture distinctive, un mélange subtil entre l'héritage français et ses profondes racines italiennes.
Cette culture se manifeste encore aujourd'hui. On la retrouve dans la langue niçoise, toujours parlée par une minorité et enseignée. Elle est présente aussi dans les traditions culinaires, les fêtes locales et l'architecture de la ville. Le patrimoine niçois est un témoignage vivant de cette histoire complexe et de cette double appartenance.
La mémoire de 1860 et de ses conséquences reste vivace. Elle est un élément clé pour comprendre la spécificité de Nice et du Comté. Cette période a façonné une ville où les influences françaises et italiennes coexistent. Elles donnent à Nice une richesse culturelle incomparable. C'est cette histoire qui continue de définir l'âme de la Côte d'Azur.
Impact Culturel
La cuisine niçoise, avec des plats comme la socca ou la salade niçoise, est un exemple parfait de cette fusion culturelle, intégrant des saveurs et des techniques des deux traditions.
Cet événement historique n'est pas qu'un fait passé. Il continue d'influencer la perception de l'identité niçoise. Il rappelle la complexité des constructions nationales et la persistance des cultures locales face aux changements politiques. L'histoire de Nice est celle d'une ville qui a su préserver son âme tout en s'adaptant.
Les générations actuelles, bien que pleinement françaises, conservent souvent un attachement à ces racines italiennes. Cela se traduit par un intérêt pour la langue niçoise, les traditions locales, et une fierté pour un patrimoine qui témoigne de cette double appartenance. La richesse de Nice réside dans cette capacité à embrasser ses multiples héritages.