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François Fillon à Nice : retour sur un meeting décisif de 2017

Retour sur la visite de François Fillon à Nice le 17 avril 2017, un déplacement crucial à six jours du premier tour d'une élection présidentielle tendue.

Hugo Dubois
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Hugo Dubois

Journaliste politique spécialisé dans la couverture des campagnes électorales et l'analyse des dynamiques politiques françaises. Hugo Dubois décrypte les stratégies des partis et les enjeux des scrutins nationaux et locaux.

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François Fillon à Nice : retour sur un meeting décisif de 2017

Le 17 avril 2017, à seulement six jours du premier tour de l'élection présidentielle, le candidat de la droite et du centre, François Fillon, a tenu un meeting crucial à Nice. Cette visite, organisée dans un contexte de campagne particulièrement tendu, visait à mobiliser son électorat dans un bastion traditionnel de la droite, les Alpes-Maritimes.

La journée niçoise du candidat ne se limitait pas à son discours au Palais Nikaïa. Son programme incluait des rencontres symboliques, notamment avec les sauveteurs en mer et les victimes de l'attentat du 14 juillet 2016, dans une tentative de redynamiser une campagne fragilisée par les affaires judiciaires.

Points Clés

  • François Fillon a organisé un grand meeting au Palais Nikaïa de Nice le 17 avril 2017, six jours avant le premier tour de la présidentielle.
  • Sa visite incluait des rencontres avec la SNSM, les ouvriers du tramway et l'association de victimes "Promenade des Anges".
  • Le déplacement s'inscrivait dans un contexte de campagne difficile, marquée par l'affaire dite du "Penelopegate".
  • Des figures locales comme Éric Ciotti et Christian Estrosi ont pris la parole, illustrant les tensions et les alliances au sein de la droite locale.

Un meeting dans la dernière ligne droite

Le lundi de Pâques 2017 n'était pas un jour férié comme les autres pour l'équipe de campagne de François Fillon. La date du 17 avril marquait le début de la toute dernière semaine avant un premier tour présidentiel qui s'annonçait extrêmement serré. Choisir Nice pour l'un de ses derniers grands rassemblements n'était pas anodin.

La ville, et plus largement le département des Alpes-Maritimes, représente un réservoir de voix historiquement favorable à la droite républicaine. Dans une campagne où chaque voix comptait, mobiliser cette base électorale était une priorité absolue pour espérer se qualifier pour le second tour.

Le Palais Nikaïa comme symbole de force

Le choix du Palais Nikaïa, l'une des plus grandes salles de spectacle de la région, visait à produire une image de force et de ferveur populaire. L'objectif était clair : contrer le récit d'une campagne à l'agonie et démontrer que le "peuple de droite" restait soudé derrière son candidat malgré la tempête médiatique et judiciaire.

Le meeting, prévu à 17 heures, a été conçu comme le point d'orgue d'une journée de reconquête sur le terrain. Des milliers de militants et sympathisants étaient attendus pour écouter celui qui avait largement remporté la primaire de la droite et du centre quelques mois plus tôt.

Le contexte tendu de la campagne Fillon

Pour comprendre l'importance de ce déplacement à Nice, il est essentiel de se souvenir du climat politique de l'époque. Après sa victoire surprise à la primaire en novembre 2016, François Fillon était donné favori pour l'élection présidentielle. Sa campagne a cependant été percutée de plein fouet par des révélations de presse à la fin du mois de janvier 2017.

L'affaire "Penelopegate"

Le 25 janvier 2017, l'hebdomadaire satirique Le Canard enchaîné publiait une enquête révélant que l'épouse du candidat, Penelope Fillon, avait été rémunérée pendant plusieurs années comme son assistante parlementaire, pour un emploi présumé fictif. Cette affaire, surnommée "Penelopegate", a déclenché une crise majeure, entraînant l'ouverture d'une enquête judiciaire et une chute spectaculaire du candidat dans les sondages.

Au moment de sa visite à Nice, François Fillon était donc un candidat sous pression, mis en examen et lâché par une partie de son propre camp. Sa stratégie consistait à dénoncer un "coup d'État institutionnel" et à s'appuyer sur le soutien de sa base la plus fidèle pour continuer le combat.

Une course à quatre

À une semaine du vote, les sondages montraient une situation inédite. Quatre candidats se tenaient dans un mouchoir de poche, rendant tout pronostic difficile : Emmanuel Macron et Marine Le Pen étaient en tête, suivis de près par François Fillon et Jean-Luc Mélenchon. Chacun pouvait encore espérer atteindre le second tour.

Une journée niçoise aux multiples enjeux

Avant son discours, le programme de François Fillon à Nice était chargé de symboles. Chaque étape visait à projeter l'image d'un homme d'État concerné par les réalités du terrain, loin des controverses parisiennes.

Hommage aux sauveteurs et aux bâtisseurs

La journée a débuté par une rencontre avec les équipages de la Société Nationale de Sauvetage en Mer (SNSM). Un geste fort pour saluer l'engagement de ces bénévoles qui assurent la sécurité sur le littoral. Cette visite mettait en avant les thèmes de la sécurité et de l'engagement citoyen.

Ensuite, le candidat s'est rendu sur le chantier de la ligne 2 du tramway de Nice. Cette visite d'un projet d'infrastructure majeur était l'occasion de parler d'économie, d'aménagement du territoire et de grands projets, se positionnant ainsi comme un bâtisseur capable de projeter le pays dans l'avenir.

Rencontre avec les victimes de l'attentat

Le moment le plus solennel de la journée fut sans doute sa rencontre prévue avec l'association de victimes de l'attentat du 14 juillet 2016, "Promenade des Anges". Moins d'un an après le drame qui avait endeuillé la ville, ce temps d'échange se voulait un moment de recueillement et de soutien. C'était aussi une manière pour le candidat d'aborder son programme en matière de lutte contre le terrorisme, un thème central de sa campagne.

Cette rencontre avec les familles des victimes était un passage obligé pour tout candidat se rendant à Nice. Il s'agissait de montrer de l'empathie, mais aussi de réaffirmer une posture de fermeté face à la menace terroriste.

Les dynamiques politiques locales

La visite de François Fillon à Nice a également mis en lumière les relations complexes au sein de la droite locale. La présence d'Éric Ciotti, alors président du département des Alpes-Maritimes, et de Christian Estrosi, président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et ancien maire de Nice, était particulièrement scrutée.

Éric Ciotti, représentant l'aile la plus à droite du parti, était un soutien fidèle de François Fillon. Sa prise de parole avant le candidat était attendue pour galvaniser les militants les plus convaincus.

Des relations complexes avec Christian Estrosi

Les rapports avec Christian Estrosi étaient plus nuancés. Soutien de Nicolas Sarkozy durant la primaire, il avait eu des échanges vifs avec François Fillon lors de sa précédente venue à Nice, le 11 janvier 2017, juste avant le début des affaires. Bien qu'il ait finalement appelé à soutenir le candidat de son parti, une certaine distance persistait.

La présence des deux hommes forts de la droite locale sur la même scène visait à afficher une image d'unité, essentielle pour rassurer l'électorat. Cependant, en coulisses, les divergences stratégiques étaient bien réelles et préfiguraient les recompositions politiques qui allaient suivre l'élection présidentielle.

Finalement, le 23 avril 2017, François Fillon arrivera en troisième position du premier tour avec 20,01 % des voix, un score insuffisant pour se qualifier. Ce meeting à Nice restera comme l'une des dernières grandes démonstrations de force d'une campagne présidentielle hors norme, marquée par une chute politique aussi brutale qu'inattendue.