Le tribunal administratif de Nice a rejeté la requête des élus d'opposition Emélie Leduc et Cédric Bourgon, qui contestaient la régularité du vote du budget 2023 de la commune de Vallauris Golfe-Juan. Si le maire Kevin Luciano salue une victoire, l'opposition offre une lecture plus nuancée de la décision, dans un climat politique local toujours sous tension.
Cette décision judiciaire vient clore un épisode marquant de la vie politique de la ville, survenu lors du conseil municipal du 11 avril 2023, une séance qui avait vu le maire perdre sa majorité et qui avait mené à des élections anticipées.
Points Clés de l'Affaire
- Le tribunal administratif de Nice a validé les délibérations du conseil municipal du 11 avril 2023.
- La requête de l'opposition portait sur des irrégularités présumées concernant le quorum et un possible conflit d'intérêts.
- Le maire Kevin Luciano qualifie la décision de "nouvelle défaite judiciaire" pour ses opposants.
- L'élue d'opposition Emélie Leduc souligne que la requête était recevable et met en avant une avancée sur la transparence des subventions.
- L'affaire s'inscrit dans un contexte de forte rivalité politique à l'approche des futures élections municipales.
La décision du tribunal administratif de Nice
La justice a rendu son verdict concernant une affaire qui a agité la scène politique de Vallauris. Le tribunal administratif de Nice a décidé de rejeter la demande formulée par deux conseillers municipaux de l'opposition, Emélie Leduc et Cédric Bourgon. Ces derniers cherchaient à faire annuler les décisions prises lors du conseil municipal du 11 avril 2023, notamment l'adoption du budget primitif de la ville.
La nouvelle a été rapidement commentée par le maire, Kevin Luciano, qui a partagé la décision sur les réseaux sociaux. Dans sa publication, il présente ce jugement comme un revers significatif pour ses adversaires politiques. « Nouvelle défaite judiciaire pour Dame Leduc », a-t-il écrit, accusant l'opposition de jouer systématiquement contre les intérêts de la ville.
« En s’en prenant notamment aux subventions versées aux associations, [Mme Leduc] prouve, s’il en était besoin, qu’elle joue systématiquement contre les intérêts de notre Ville. Espérons que sa nouvelle défaite judiciaire la ramènera à davantage de raison. » - Kevin Luciano, maire de Vallauris, sur les réseaux sociaux.
Cette déclaration met en lumière la fracture profonde qui existe entre la majorité municipale et les groupes d'opposition, transformant une décision de justice en un argument politique.
Les arguments de l'opposition rejetés par la cour
La requête des élus d'opposition reposait sur deux points principaux qu'ils estimaient être des irrégularités suffisamment graves pour invalider le vote du budget.
La question sensible du quorum
Le premier argument concernait le quorum, c'est-à-dire le nombre minimum d'élus présents nécessaire pour qu'une délibération soit valide. Lors de la séance du 11 avril 2023, la situation était particulièrement tendue, car le maire faisait face à une fronde au sein de sa propre majorité.
Selon l'opposition, le quorum n'était pas atteint au début de la séance en raison de l'absence d'un élu de la majorité, M. Sebastian. Ce dernier serait finalement arrivé après une interruption de séance de 40 minutes et un appel téléphonique du maire, permettant ainsi la poursuite des débats. Le tribunal n'a pas retenu cet argument comme un vice de procédure.
Contexte : La crise politique de 2023
Le conseil municipal du 11 avril 2023 s'est déroulé dans un climat de crise politique majeure à Vallauris. Plusieurs élus de la majorité, surnommés les "félons" par le maire, s'étaient désolidarisés. Le vote du budget s'est joué à une seule voix, et le maire a finalement perdu sa majorité ce soir-là. Cette situation a conduit à l'organisation d'élections municipales anticipées quelques mois plus tard, qui ont vu la réélection de Kevin Luciano.
Un risque de prise illégale d'intérêt ?
Le second point soulevé par les requérants portait sur un possible conflit d'intérêts. L'adjoint au maire, Dominique Dermy, était membre d'une association bénéficiant d'une subvention incluse dans le budget soumis au vote. L'opposition estimait que sa participation au vote pouvait constituer une prise illégale d'intérêt.
Au cours de la séance, après une interruption et une discussion avec le maire, l'adjoint avait annoncé son retrait de l'association concernée. Le tribunal administratif a également rejeté cet argument, validant la procédure suivie par la municipalité.
Une lecture différente de la décision
Pour Emélie Leduc, la décision du tribunal ne constitue pas la défaite décrite par le maire. Elle offre une interprétation bien plus nuancée du jugement et de ses conséquences.
« Ce conseil municipal restera dans les mémoires comme un vaudeville. Il nous semblait impossible de ne pas saisir le tribunal administratif », explique-t-elle. Elle souligne un détail important : « Nous n’avons pour autant pas été condamnés [aux dépens], ce qui tend à prouver que la requête était recevable. » Pour elle, cela signifie que les questions soulevées étaient légitimes.
Une avancée pour la transparence
Selon Emélie Leduc, cette procédure a eu un effet positif concret. Depuis 2024, la municipalité a modifié ses pratiques. Le vote des subventions aux associations est désormais disjoint du vote global du budget. Cette séparation constitue, selon l'élue, « une réelle avancée en termes de risque de prise illégale d’intérêt ».
L'élue d'opposition conteste également la rhétorique du maire sur les "défaites judiciaires". Elle rappelle avoir remporté un précédent jugement contre la mairie concernant le non-respect du droit d'expression des élus minoritaires. « Cette décision rendue ce vendredi est donc ma première défaite et je l’accepte », précise-t-elle, marquant sa différence avec le maire qu'elle accuse de ne pas toujours respecter les décisions de justice.
Un climat politique toujours électrique
Cette bataille juridique est le reflet d'une atmosphère politique particulièrement tendue à Vallauris Golfe-Juan. La crise de 2023 a laissé des traces profondes et les relations entre la majorité et l'opposition sont marquées par une forte méfiance.
La communication offensive du maire sur les réseaux sociaux et la réponse argumentée de l'opposition montrent que chaque événement, y compris une décision de justice, est immédiatement utilisé dans l'arène politique. Les deux camps se positionnent déjà en vue des prochaines échéances électorales.
Le rejet de la requête par le tribunal administratif conforte la majorité municipale dans sa gestion, mais il ne met pas fin au débat de fond sur la gouvernance et la transparence. L'opposition, de son côté, continue de se poser en contre-pouvoir vigilant, prête à contester les décisions qu'elle estime contraires à l'intérêt général. La vie politique de la cité des Potiers promet de rester animée dans les mois à venir.