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A8 : Des expropriations de sous-sols pour des travaux à Cagnes et Saint-Laurent

Vinci Autoroutes lancera en 2026 des travaux sur l'A8 qui nécessitent l'expropriation du sous-sol de propriétés à Cagnes et Saint-Laurent-du-Var.

Alexandre Moreau
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Alexandre Moreau

Journaliste spécialisé dans les questions de transport, de mobilité et d'infrastructures sur la Côte d'Azur. Alexandre Moreau analyse les conditions de circulation, les projets d'aménagement et les enjeux de la mobilité quotidienne pour les habitants de la région.

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A8 : Des expropriations de sous-sols pour des travaux à Cagnes et Saint-Laurent

Vinci Autoroutes prévoit de lancer en 2026 un important chantier de consolidation de quatre murs de soutènement le long de l'autoroute A8, entre Cagnes-sur-Mer et Saint-Laurent-du-Var. Pour mener à bien ces travaux de maintenance, jugés essentiels à la sécurité, l'entreprise doit acquérir une partie du sous-sol de plusieurs propriétés privées, une procédure qui suscite des interrogations chez les riverains concernés.

Points Clés

  • Début des travaux : Le chantier est programmé pour démarrer en 2026 et devrait durer environ deux ans.
  • Zone concernée : L'intervention vise quatre murs de soutènement situés sur les communes de Cagnes-sur-Mer et Saint-Laurent-du-Var.
  • Procédure d'acquisition : Vinci Autoroutes doit acquérir le sous-sol (tréfonds) de plusieurs parcelles privées pour ancrer les renforts.
  • Impact sur le trafic : Les travaux seront majoritairement réalisés de nuit pour limiter les perturbations sur cet axe très fréquenté.

Un chantier de maintenance préventive

L'autoroute A8 est un axe vital pour la Côte d'Azur, avec un trafic quotidien dépassant les 150 000 véhicules. La sécurité de cette infrastructure repose en partie sur la solidité de ses ouvrages d'art, notamment les murs de soutènement qui la bordent.

Dans le cadre de son programme de surveillance continue, Vinci Autoroutes a identifié la nécessité de renforcer quatre de ces murs. Julien Sol, responsable du pôle études et travaux chez Vinci, explique que cette opération découle d'une démarche préventive classique. "Vinci Autoroutes inspecte régulièrement plus de 2000 ouvrages sur le réseau pour identifier les besoins d’entretien du patrimoine", précise-t-il. "C’est ce qui a contribué à déclencher cette opération de confortement."

Quatre murs concernés par les travaux

Le projet vise des structures de tailles différentes sur deux communes :

  • À Cagnes-sur-Mer : deux murs de 60 et 83 mètres de long.
  • À Saint-Laurent-du-Var : deux murs plus importants, mesurant 350 et 450 mètres.

Le coût total de l'opération est estimé à plusieurs millions d'euros, reflétant l'ampleur des moyens techniques à déployer.

La nécessité d'acquérir le sous-sol des propriétés

La solution technique retenue pour consolider ces murs vieillissants implique d'intervenir au-delà des limites de l'autoroute. La méthode consiste à forer à travers les murs pour y insérer de longues barres d'acier en biais, appelées "clous". Ces ancrages s'enfonceront profondément dans le sol situé derrière les murs pour garantir leur stabilité à long terme.

Cette technique nécessite d'utiliser le sous-sol des propriétés privées adjacentes. C'est ce que l'on appelle le tréfonds, c'est-à-dire la partie du sol située sous la surface, ici entre un et trois mètres de profondeur. L'acquisition de ce volume souterrain est donc une condition indispensable à la réalisation des travaux.

Une procédure d'expropriation encadrée

Face à cette contrainte, Vinci Autoroutes a engagé des démarches auprès des propriétaires concernés. "Une fois qu’on a identifié le besoin de travaux, on a lancé des études pour définir la solution de confortement", détaille Julien Sol. "C’est là qu’on a engagé des négociations amiables avec les propriétaires."

À ce jour, environ la moitié des propriétaires ont accepté une indemnisation en échange de la cession de leur tréfonds. Pour les autres, les discussions se poursuivent. Cependant, si aucun accord n'est trouvé, une procédure d'expropriation formelle sera enclenchée.

L'expropriation pour cause d'utilité publique

La loi autorise l'expropriation de biens privés lorsqu'un projet est déclaré "d'utilité publique". Cette procédure très encadrée inclut une enquête publique et un arrêté préfectoral. Elle garantit une juste et préalable indemnisation au propriétaire, même en l'absence d'accord amiable.

Julien Sol souligne le caractère légal de la démarche : "Étant donné l’intérêt général du projet, on a recours à l’expropriation, sachant que celle-ci résulte d’une procédure cadrée par la législation."

Inquiétudes et résignation chez les riverains

Pour les habitants dont les maisons bordent l'autoroute, la nouvelle a été accueillie avec un mélange d'inquiétude et de résignation. Cathy Zortea, propriétaire d'une villa à Saint-Laurent-du-Var, a accepté l'accord proposé par Vinci, mais reste préoccupée.

"On sait que les villas de l’autre côté de l’autoroute ont des fissures, on a peur que ça nous arrive et que ça pose des problèmes à la revente. Mais on n’a pas trop le choix."

Elle mentionne également que la présence d'une piscine et d'un vide sanitaire sur sa propriété a été prise en compte. "Ils nous ont dit qu’ils s’adapteraient", ajoute-t-elle, tout en regrettant un manque de communication récent de la part de l'opérateur autoroutier. "Maintenant, on attend de passer chez le notaire."

Un autre riverain exprime un sentiment similaire, mêlant pragmatisme et fatalisme : "S’ils le font, c’est bien qu’il y a une raison, et de toute façon, on n’a pas le choix." Cette perception illustre le dilemme des résidents face à un projet d'intérêt général qui impacte directement leur propriété.

Détails techniques et calendrier du chantier

Les préparatifs du chantier sont déjà visibles pour les usagers de l'A8. Des blocs de béton ont été installés sur le bas-côté pour sécuriser la zone où les engins interviendront. L'appel d'offres pour désigner l'entreprise qui réalisera les travaux est actuellement en cours.

Le chantier débutera en 2026 et s'étalera sur une période de deux ans. La principale contrainte est de minimiser la gêne occasionnée sur cet axe majeur. "Pour limiter la gêne des usagers, on va réaliser ces travaux de nuit, depuis le bord de l’autoroute", confirme Julien Sol.

La technique de "clouage" est une méthode éprouvée pour la stabilisation des ouvrages en terre. Elle permet de redonner une "nouvelle vie au mur" sans avoir à le démolir et le reconstruire entièrement, une option qui serait bien plus coûteuse et perturbatrice.

Cette opération, bien que complexe et impactante pour les riverains, est présentée par Vinci Autoroutes comme une intervention de maintenance nécessaire, liée au vieillissement normal des infrastructures. Elle vise à garantir la sécurité de centaines de milliers d'automobilistes pour les décennies à venir.