Vingt-cinq salariés de l'entreprise Ecogem, spécialisée dans le tri et le réemploi d'appareils électroménagers dans la zone industrielle de Carros, risquent de perdre leur emploi. Cette situation fait suite à la décision de son client principal, l'éco-organisme Ecosystem, de mettre fin brutalement au contrat qui les liait, plongeant l'entreprise et ses employés dans une profonde incertitude.
Points Clés
- 25 emplois sont directement menacés sur le site Ecogem de Carros.
- Ecosystem, représentant 94 % du chiffre d'affaires d'Ecogem, a résilié le contrat.
- Un litige commercial et réglementaire oppose les deux entreprises devant le tribunal de commerce.
- La filière locale de réemploi d'électroménager est actuellement à l'arrêt.
L'impact immédiat d'une décision brutale
Le site Ecogem de Carros, qui emploie au total 70 personnes avec son antenne parisienne, fait face à une crise majeure. En septembre, son partenaire commercial quasi exclusif, Ecosystem, a demandé la cessation immédiate de leur collaboration, un contrat qui devait pourtant courir jusqu'à la fin de l'année 2026.
Cette rupture met en péril l'activité même du site, qui joue un rôle central dans l'économie circulaire locale. « Nous sommes un centre d’aiguillage où on reçoit, trie et, dans certains cas répare le gros électroménager », a précisé Benjamin Carlu, directeur des opérations d'Ecogem. L'entreprise traitait quotidiennement entre 300 et 600 appareils usagés, collectés par des enseignes comme Darty ou Conforama.
Un maillon essentiel de l'économie circulaire
Selon les chiffres fournis par l'entreprise, 20 à 30 % des appareils reçus étaient sauvés de la destruction. Ces équipements réparés ou fonctionnels étaient ensuite dirigés vers des structures de l'économie sociale et solidaire, telles qu'Emmaüs ou Envie, pour être revendus à bas prix.
Une filière de réemploi paralysée
La fin du contrat a des conséquences qui dépassent les murs de l'entreprise. « La filière du réemploi est à l’arrêt », a déploré Hugo Boy, directeur du site de Carros. Sans la prestation d'Ecogem, les grandes enseignes se retrouvent sans solution pour valoriser les anciens appareils, les contraignant à les envoyer directement à la benne.
Plusieurs distributeurs ont confirmé que cet arrêt a provoqué un impact financier et logistique important, augmentant la pénibilité pour leurs équipes et annulant les efforts de réemploi.
Un conflit aux versions opposées
Les raisons de cette rupture soudaine font l'objet d'un profond désaccord entre les deux parties. Pour la direction d'Ecogem, la cause est purement commerciale. « Ecosystem a voulu une subite renégociation en cours de contrat. Ils ont exigé une baisse de nos tarifs de 30 %. C’était impossible à tenir », affirme l'entreprise.
De son côté, Ecosystem avance des raisons réglementaires et sécuritaires. L'éco-organisme, qui est également propriétaire des locaux de Carros, soutient qu'Ecogem ne s'est pas conformée à ses obligations. « Ces activités sont soumises au régime des installations classées pour la protection de l’environnement (réglementation spécifique liée notamment au risque incendie). Malgré nos nombreuses relances, la société Ecogem ne s’est jamais conformée à cette obligation, ce qui nous a contraints à résilier ces contrats », a déclaré Ecosystem.
Le rôle des éco-organismes
Ecosystem, comme d'autres sociétés privées à but non lucratif, est agréé par les pouvoirs publics pour organiser la collecte et le traitement des déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE). Son financement provient de l'écoparticipation payée par les consommateurs lors de l'achat d'un appareil neuf.
Le différend a été porté devant le tribunal de commerce de Versailles, qui doit rendre sa décision le 24 octobre. En attendant, la direction d'Ecogem étudie toutes les options pour sauver l'entreprise. « Le chômage partiel des équipes semble inévitable », a reconnu Benjamin Carlu, qui espère trouver un autre partenaire ou réorienter l'activité vers la logistique.
L'inquiétude des salariés et la mobilisation politique
Pour les 25 salariés du site, l'avenir est suspendu à cette décision de justice. Beaucoup sont des jeunes formés sur le tas, parfois issus de parcours d'insertion difficiles. L'incertitude et le sentiment d'injustice dominent.
« J’ai le moral de quelqu’un qui risque de perdre son emploi. Tout s’arrête du jour au lendemain. C’est cruel ! »
Ryan, un autre employé, se dit « déçu » de voir s'arrêter un projet dans lequel l'équipe s'était investie. « Ce boulot me plaisait. J’y trouvais un sens », a ajouté Eric, un autre technicien.
Les élus locaux se mobilisent
La situation a rapidement attiré l'attention des responsables politiques locaux. Lionel Tivoli, député (RN) de la circonscription, a demandé une rencontre tripartite entre les deux entreprises et ses services. Il a souligné que le modèle d'Ecogem « participe pleinement aux objectifs fixés par la transition écologique et l’économie circulaire » et qu'il « doit être soutenu et non fragilisé ».
Yannick Bernard, maire (DVD) de Carros, a également exprimé son soutien aux salariés. Il espère que le dynamisme de la zone industrielle permettra une réinsertion rapide en cas de licenciement, mettant en avant leurs « compétences techniques précieuses ». Il s'est engagé à appuyer leurs candidatures et à suivre de près l'avenir du site industriel.