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Antibes face à une épidémie de chikungunya sans précédent

La ville d'Antibes fait face à une flambée de chikungunya sans précédent en France métropolitaine, avec plus de 100 cas locaux. Les autorités sanitaires ont lancé une vaste opération de contrôle et de

Marion Dubois
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Marion Dubois

Journaliste spécialisée dans les questions de santé publique, les épidémies et les politiques sanitaires. Marion Dubois couvre les alertes sanitaires et décrypte les enjeux liés aux maladies infectieuses et à leur prévention.

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Antibes face à une épidémie de chikungunya sans précédent

La ville d'Antibes, dans les Alpes-Maritimes, est confrontée à une situation sanitaire exceptionnelle avec plus de 100 cas de chikungunya recensés depuis le mois de juillet. Cette flambée épidémique, transmise par le moustique tigre, représente le plus grand foyer autochtone jamais observé en France métropolitaine, mobilisant massivement les autorités sanitaires et locales.

Points Clés

  • Plus de 100 cas de chikungunya confirmés à Antibes, une première en France métropolitaine.
  • La transmission est assurée localement par le moustique tigre, bien implanté dans la région.
  • Les autorités ont déployé une réponse coordonnée incluant démoustication, surveillance médicale et une vaste campagne de sensibilisation.
  • Une alerte FR-Alert sera envoyée aux habitants pour renforcer les gestes de prévention.

Une situation épidémiologique sous haute surveillance

Depuis le début de l'été, la ville d'Antibes est devenue l'épicentre d'une épidémie de chikungunya. Le virus, habituellement associé aux régions tropicales, se propage désormais localement. La cause de cette transmission est le moustique tigre (Aedes albopictus), un insecte capable de transmettre le virus d'une personne infectée à une personne saine.

Les symptômes de la maladie, qui apparaissent après une piqûre, sont souvent invalidants. Ils incluent une forte fièvre, des douleurs articulaires intenses, des maux de tête et des éruptions cutanées. Pour de nombreuses personnes, les douleurs articulaires peuvent persister pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois.

Chiffres de l'épidémie

Selon les dernières données de Santé publique France, le bilan est significatif : 103 cas autochtones ont été identifiés uniquement à Antibes. Ce foyer représente la majeure partie des 140 cas recensés dans le département des Alpes-Maritimes et des 312 cas pour l'ensemble de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

La propagation du moustique tigre en cause

Le moustique tigre est présent en France métropolitaine depuis 2004 et n'a cessé de coloniser de nouveaux territoires, notamment sur le littoral méditerranéen. Ses caractéristiques le rendent particulièrement difficile à contrôler : il se développe dans de très petites quantités d'eau stagnante, comme les soucoupes de pots de fleurs, les gouttières ou les jouets laissés dans le jardin.

Sa capacité à transmettre des maladies comme le chikungunya, la dengue ou le Zika transforme sa présence, autrefois simple nuisance, en un véritable enjeu de santé publique. L'épisode actuel à Antibes démontre que le risque de voir émerger des foyers épidémiques en métropole est désormais bien réel.

La réponse coordonnée des autorités sanitaires

Face à l'ampleur de la situation, une mobilisation conjointe de l'Agence Régionale de Santé (ARS), de la Préfecture des Alpes-Maritimes et de la Mairie d'Antibes a été mise en place. La stratégie repose sur plusieurs axes pour tenter de contenir la propagation du virus le plus rapidement possible.

Des enquêtes épidémiologiques sont menées autour de chaque cas signalé. L'objectif est de retracer les déplacements des personnes malades pour identifier les zones de contamination potentielle et d'agir en conséquence. Des opérations de démoustication ciblées sont ensuite déclenchées dans un périmètre défini autour des domiciles des patients pour éliminer les moustiques adultes potentiellement porteurs du virus.

Le rôle des professionnels de santé

Les médecins généralistes, les pharmaciens et les laboratoires d'analyses médicales sont en première ligne. Ils ont reçu des directives précises pour identifier rapidement les symptômes du chikungunya et signaler sans délai tout cas suspect aux autorités sanitaires. La Communauté Professionnelle Territoriale de Santé (CPTS) Antipolis a également renforcé son offre de consultations pour assurer un diagnostic rapide et éviter que les personnes infectées ne continuent de propager le virus en se faisant piquer à nouveau.

Une réunion de suivi est prévue le 25 septembre entre les praticiens et les autorités pour ajuster la stratégie en fonction de l'évolution de l'épidémie. La rapidité du diagnostic et la protection des malades contre de nouvelles piqûres sont considérées comme des éléments essentiels pour briser la chaîne de transmission.

Une campagne de sensibilisation massive des habitants

Convaincues que la lutte contre le moustique tigre ne peut être gagnée sans la participation active des citoyens, les autorités ont lancé une vaste campagne d'information. Tous les canaux de communication sont utilisés pour toucher un maximum de personnes.

Des tracts informatifs sont distribués par l'Assurance Maladie, des médiateurs sont présents dans les lieux publics comme les centres commerciaux pour expliquer les bons gestes, et plus de 11 000 habitants du nord d'Antibes, la zone la plus touchée, ont reçu des SMS d'alerte. L'objectif est simple : rappeler à chacun son rôle dans la prévention.

L'alerte FR-Alert pour une mobilisation générale

Pour marquer les esprits et s'assurer que le message soit entendu par tous, une mesure forte sera déployée. Le mercredi 24 septembre à 10 heures, un message via le système FR-Alert sera envoyé sur tous les téléphones mobiles se trouvant dans la zone d'Antibes. Ce dispositif, habituellement réservé aux situations de danger imminent, sera utilisé comme une alerte sanitaire pour souligner l'urgence de la situation.

"Cette alerte a pour but de rappeler à l'ensemble de la population les gestes indispensables pour lutter contre la prolifération du moustique tigre et se protéger des piqûres," a indiqué un communiqué de la préfecture.

Les gestes de prévention : l'affaire de tous

La victoire contre le chikungunya repose en grande partie sur des gestes simples du quotidien que chaque citoyen peut et doit appliquer. La principale mesure est d'éliminer les lieux de ponte du moustique tigre.

Voici les recommandations clés des autorités sanitaires :

  • Vider et nettoyer toutes les semaines les récipients pouvant contenir de l'eau : soucoupes, vases, seaux, etc.
  • Couvrir les réservoirs d'eau de pluie avec un couvercle ou une moustiquaire.
  • Entretenir les gouttières pour éviter que l'eau ne stagne.
  • Ranger à l'abri de la pluie tous les objets pouvant se remplir d'eau.

En complément de ces actions, la protection individuelle est cruciale, surtout pour les personnes malades qui ne doivent pas transmettre le virus à d'autres moustiques. Il est conseillé de porter des vêtements longs et amples, d'utiliser des répulsifs cutanés efficaces (contenant de l'Icaridine, de l'IR3535 ou du DEET) et d'installer des moustiquaires aux fenêtres ou autour des lits. Les autorités insistent sur le fait que les gadgets comme les bracelets anti-moustiques ou les appareils à ultrasons n'ont pas prouvé leur efficacité.

L'effort collectif est la seule solution pour endiguer cette épidémie et éviter que de tels foyers ne se multiplient à l'avenir sur le territoire métropolitain.