Un couple de retraités, locataires de longue date d'un logement social dans le quartier des Moulins à Nice, a été expulsé ce vendredi 17 octobre 2025. Malgré des loyers toujours payés, une décision de justice a été appliquée en raison de nuisances répétées liées à des activités de mécanique non autorisées, créant une vive émotion et des tensions dans le voisinage.
L'expulsion, menée avec le concours de la force publique, a mis en lumière un conflit complexe entre la famille et le bailleur social, Côte d'Azur Habitat, qui dure depuis 2021.
Les points clés de l'affaire
- Un couple de retraités, Fadila, 65 ans, et Mohamed, 73 ans, a été expulsé de son logement social à Nice.
- La famille affirme être à jour de ses loyers depuis son installation en 1999.
- Le bailleur, Côte d'Azur Habitat, justifie la procédure par des nuisances et des incivilités répétées depuis 2021.
- Le conflit trouve son origine dans des activités de mécanique sauvage pratiquées par le père sur le parking.
- L'expulsion a provoqué une forte tension dans le quartier, entraînant une intervention policière et l'interpellation d'un des fils du couple.
Un conflit de longue date entre le locataire et le bailleur
Le différend qui a conduit à cette expulsion remonte à 2021. Selon le bailleur social Côte d'Azur Habitat (CAh), la famille est à l'origine de « nuisances, incivilités et dégâts matériels de manière répétée ». Le principal point de friction concerne Mohamed, le père de famille âgé de 73 ans, qui effectuait des réparations automobiles sur le parking de la résidence.
Les voisins décrivent cette activité comme un service rendu à la communauté. « Il rendait service, il ne faisait pas payer, ou alors on lui glissait un petit billet », assure un habitant du quartier. Cependant, pour CAh, cette pratique de « mécanique sauvage » générait du bruit et des dégradations, en violation du règlement intérieur.
Des avertissements restés sans effet
Le bailleur social affirme avoir tenté de résoudre la situation à l'amiable. Des rappels au règlement ont été envoyés à plusieurs reprises. Une étape de conciliation, appelée « Conseil des droits et des devoirs », a été proposée à la famille. Il s'agissait d'une « rencontre de la dernière chance » pour éviter une procédure judiciaire.
La procédure de conciliation
Le Conseil des droits et des devoirs a été mis en place en 2021 par Côte d'Azur Habitat. Son objectif est de trouver des solutions amiables aux situations conflictuelles avant d'engager des actions en justice. La non-présentation du locataire à ce rendez-vous peut entraîner la poursuite de la procédure d'expulsion.
Selon CAh, le locataire ne s'est pas présenté à ce rendez-vous crucial. La famille conteste cette version. Younès, le fils aîné, explique que ses parents étaient à l'étranger à ce moment-là. « J'y suis allé, mais je n'ai pas eu le droit de rentrer, ils ne nous ont jamais recontactés », se défend-il. Suite à cet échec, la procédure judiciaire a été enclenchée.
Une expulsion sous haute tension
Le vendredi 17 octobre, dès les premières heures de la matinée, un important dispositif a été déployé devant l'immeuble de 15 étages situé avenue de la Méditerranée. La préfecture des Alpes-Maritimes avait accordé le concours de la force publique pour sécuriser l'opération. Des policiers, des pompiers et des représentants de Côte d'Azur Habitat étaient sur place.
La situation est rapidement devenue tendue. Entourée de voisines venues la soutenir, Fadila, 65 ans, a tenté de plaider sa cause. « Je vous en supplie, on paye toujours le loyer », a-t-elle imploré. Elle a présenté des certificats médicaux attestant de sa fragilité et de celle de son mari, jugeant leur état de santé incompatible avec un relogement.
« On est à jour du loyer, on a toujours tout payé. D'abord, je regarde si le loyer passe, après je fais les courses. »
L'un des fils du couple a été interpellé par la police suite à une vive altercation. Nourredine Debbari, président de l'association Nice Moulins Solidarités 06, présent sur les lieux, a exprimé son inquiétude face à l'escalade des tensions dans un quartier déjà sensible.
Le couple avait signé son bail en 1999 pour cet appartement de 4 pièces. Ils y vivaient depuis 25 ans, et l'un de leurs fils habitait encore avec eux.
Au cours de l'intervention, Fadila a été victime d'un malaise et a été prise en charge par les pompiers. Son mari, Mohamed, a quitté les lieux avec une petite valise. Une porte anti-squat a été installée par le bailleur social une fois l'appartement vidé.
Une situation juridique encore en suspens
Bien que l'expulsion ait été exécutée, l'affaire n'est pas totalement close sur le plan judiciaire. La famille a fait appel de la décision de justice ordonnant son départ. Une audience est prévue pour le mois de février de l'année suivante. Cette procédure en cours ajoute une couche de complexité à la situation.
Le bailleur social se défend en évoquant également des menaces qu'aurait proférées le père de famille à l'encontre d'un de ses agents. Une accusation que le fils aîné, Younès, nuance fortement : « Le ton est monté, car c’est l’agent qui a mal parlé à mon père ».
Vers une possible médiation ?
Face à l'émotion suscitée par cette expulsion, une porte de sortie pourrait s'ouvrir. Selon une source proche du dossier, Anthony Borré, président de Côte d'Azur Habitat et Premier adjoint au maire de Nice, a proposé une rencontre au couple la semaine prochaine.
Cette proposition est conditionnée à la cessation des menaces. En signe d'apaisement, il a également été convenu que les affaires de la famille puissent rester temporairement dans l'appartement, le temps pour elle de trouver une solution de déménagement. L'avenir du couple reste donc incertain, suspendu à la fois à l'issue de la procédure d'appel et aux résultats de cette potentielle médiation.