Le tribunal correctionnel de Nice a été le théâtre de réquisitions sévères ce vendredi, où le procureur a demandé des peines de 12 à 18 mois d'emprisonnement contre cinq policiers. Ils sont accusés de violences et d'actes de discrimination envers deux hommes interpellés pour trafic de drogue en juillet 2025.
Les faits, qui auraient eu lieu lors d'un transfert au commissariat, sont au cœur d'un procès qui met en lumière les tensions et les pratiques policières. La décision du tribunal est attendue pour le 10 novembre.
Les points clés de l'affaire
- Cinq policiers niçois sont jugés pour violences, injures et discrimination.
- Le procureur a requis des peines de 12 à 18 mois de prison et une interdiction d'exercer.
- Un enregistrement audio réalisé par l'un des interpellés constitue une preuve centrale.
- Les policiers nient les violences mais reconnaissent des injures qualifiées de "mauvaise blague".
- Le verdict sera rendu par le tribunal de Nice le 10 novembre.
Des réquisitions fermes du parquet
Lors de l'audience, le procureur de la République a dressé un portrait sévère des agissements reprochés aux cinq fonctionnaires. Âgés de 30 à 48 ans, et malgré des carrières sans antécédents judiciaires ou disciplinaires, ils font face à des accusations graves.
Les peines demandées, allant de 12 à 18 mois d'emprisonnement, sont assorties d'une réquisition d'interdiction définitive d'exercer la fonction de policier. Cette mesure souligne la gravité des faits aux yeux de l'accusation.
"Ce sont de bons fonctionnaires sans antécédent judiciaire ou disciplinaire, mais est-ce que vous avez encore confiance en eux, est-ce que vous voulez les revoir sur la voie publique ?" a lancé le procureur en s'adressant directement au tribunal.
Cette question rhétorique a pesé lourdement dans la salle d'audience, mettant en balance la carrière des agents et la confiance du public dans les forces de l'ordre.
Le contexte de l'interpellation
L'affaire trouve son origine le 22 juillet 2025, lors de l'interpellation de deux ressortissants tunisiens pour trafic de drogue dans le quartier sensible des Moulins, à Nice. C'est durant le transport en fourgonnette vers le commissariat que les violences et humiliations auraient été commises.
Un enregistrement audio au cœur des débats
L'élément central du dossier est un enregistrement audio, réalisé discrètement par l'un des deux hommes interpellés avec son téléphone portable. Diffusé pendant l'audience, cet enregistrement a révélé une scène de grande tension.
Selon les retranscriptions, on y entendrait des cris, des pleurs et le bruit de coups. Des insultes à caractère raciste et des moqueries liées à la religion des individus seraient également audibles, proférées par au moins un des policiers.
L'accusation de l'humiliation par le Coran
L'un des faits les plus graves dénoncés par l'accusation concerne un Coran qui aurait été trouvé dans le sac de l'un des hommes. Les policiers sont accusés de s'en être saisis pour l'humilier, allant jusqu'à en déchirer des pages pour en faire des boulettes et les lui mettre de force dans la bouche.
Cet acte, s'il est avéré, constitue une humiliation à caractère religieux et discriminatoire, un point lourdement souligné par l'accusation pour caractériser la nature des faits.
L'un des deux hommes interpellés était présent à l'audience. Il exécute actuellement une peine de 18 mois de prison pour vol en réunion et fait l'objet d'une interdiction du territoire français de dix ans. Le second individu n'a pas souhaité se constituer partie civile.
La version des policiers et la défense
Face à ces accusations, les cinq fonctionnaires ont nié en bloc les violences physiques. Ils ont cependant reconnu avoir tenu certains propos injurieux, mais en minimisant leur portée.
Selon leur version, il ne s'agissait pas d'un Coran mais d'un simple document sans valeur trouvé dans une poubelle plus tôt dans la journée. Ils affirment avoir fait une "mauvaise blague" pour "embêter" l'individu, sans intention de l'humilier sur la base de sa religion.
Leur avocat, Maître Éric Borghini, a vivement critiqué les réquisitions du parquet, les qualifiant d'"hallucinantes" et de "peine de mort civile" pour ses clients. Il a plaidé l'incompréhension face à une situation où, selon lui, "un trafiquant de drogue sous OQTF serait mieux traité que des fonctionnaires de la police nationale".
La défense a insisté sur le parcours exemplaire des policiers, dont l'un compte trente années de service sans la moindre sanction. Elle a tenté de replacer les faits dans le contexte d'une intervention difficile et de la pression quotidienne subie par les forces de l'ordre.
La décision finale reviendra au tribunal, qui devra trancher entre deux récits radicalement opposés. Le jugement, attendu le 10 novembre, est particulièrement scruté et aura des conséquences importantes, tant pour les cinq hommes sur le banc des prévenus que pour l'image de la police locale.





