L'artiste de renommée internationale, Ernest Pignon-Ernest, a officiellement annoncé son soutien à la liste d'union de la gauche pour les prochaines élections municipales à Nice. Connu pour son art urbain engagé, il a accepté de présider le comité de soutien de la coalition réunissant Les Écologistes, le Parti communiste français et le Parti socialiste.
Originaire de Nice, l'artiste justifie sa décision par une inquiétude croissante face à la droitisation du discours politique local et par la nécessité, selon lui, d'un changement après des décennies de gouvernance par la même famille politique.
Points Clés
- Ernest Pignon-Ernest préside le comité de soutien de la liste de gauche (Écologistes, PCF, PS) à Nice.
- Sa principale motivation est de contrer ce qu'il perçoit comme une « surenchère » des candidats de droite.
- Il appelle à l'union de toutes les forces de gauche, malgré les divisions actuelles.
- L'artiste met en avant des enjeux sociaux comme le logement et la gratuité des transports.
- Il précise qu'il ne sera pas candidat et n'occupera aucune fonction politique en cas de victoire.
Un engagement motivé par l'urgence politique
Né à Nice en 1942, Ernest Pignon-Ernest a toujours lié son art à ses convictions. Précurseur du street-art, ses silhouettes éphémères collées sur les murs des villes du monde entier ont souvent porté des messages forts contre l'injustice, le nucléaire ou l'apartheid. Aujourd'hui, il franchit un nouveau pas en s'engageant plus directement dans le débat politique de sa ville natale.
L'artiste explique que le climat politique actuel à Nice a été le principal déclencheur de sa décision. Il se dit préoccupé par une compétition entre les candidats de droite « à celui qui sera le plus à droite ». Cette situation lui rappelle un souvenir douloureux de l'histoire niçoise.
« Ça m’a rappelé le moment où Nice s’est déshonorée en étant la seule ville au monde à être jumelée avec Le Cap et l’Afrique du Sud de l’Apartheid », confie-t-il, faisant référence à la décision prise en 1974 par le maire de l'époque, Jacques Médecin.
Cette décision avait été prise trois mois seulement après que les Nations Unies aient qualifié l'apartheid de crime contre l'humanité. À l'époque, l'artiste avait réagi en disséminant des centaines de dessins dans la ville, ce qui avait provoqué une rupture durable avec Nice. Pour lui, l'heure est de nouveau à la mobilisation citoyenne.
Un artiste aux racines niçoises
Ernest Pignon-Ernest est issu d'un milieu populaire des quartiers de Riquier et du port. Son père travaillait aux abattoirs et sa mère était coiffeuse. Cet ancrage local et cette histoire personnelle nourrissent son attachement à une gauche historique et sociale, incarnée à ses yeux par des figures comme l'ancien député communiste Virgile Barel.
Un appel à l'union face à une opportunité historique
Bien qu'il soutienne fermement la liste composée des Écologistes, du PCF et du PS, Ernest Pignon-Ernest ne cache pas sa déception face à la division de la gauche. Une autre liste, regroupant notamment La France Insoumise et le collectif citoyen ViVA!, se présente également aux électeurs.
« Quand j’ai accepté, j’étais persuadé qu’il y avait une liste d’union de gauche, c’était d’une telle évidence », regrette-t-il. Il considère que le contexte politique local, marqué par de fortes tensions à droite, représente une « occasion historique » pour la gauche de remporter la mairie.
Cependant, il estime que cette division pourrait compromettre cette chance unique. L'artiste lance donc un appel clair au rassemblement. « La nécessité historique fait qu’ils seront obligés de se rallier. J’appelle à l’union », déclare-t-il, espérant que les différentes sensibilités sauront dépasser leurs différends pour le second tour.
Des priorités sociales et écologiques
Le soutien d'Ernest Pignon-Ernest à cette liste spécifique s'ancre dans des propositions concrètes qui résonnent avec ses propres combats. Il met particulièrement en avant la question du logement social. Il rappelle que Nice ne respecte pas ses obligations légales en la matière.
Le logement social à Nice : un enjeu majeur
La ville de Nice compte actuellement 13 % de logements sociaux, alors que la loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU) en impose 25 %. Environ 30 000 demandes de logement social sont actuellement en attente dans la ville, illustrant la difficulté pour de nombreux actifs de se loger.
L'artiste dénonce une politique qui favorise le « surtourisme de luxe » au détriment des besoins des habitants. « On connaît tous des gens qui travaillent et qui n’arrivent plus à se loger en ville. Ça contribue à créer des ghettos », s'indigne-t-il.
Une autre mesure phare qui a retenu son attention est la proposition de gratuité des transports en commun. Il y voit un « choix populaire » et une mesure de justice sociale, contrastant avec les priorités actuelles de la municipalité.
Le rôle de l'artiste dans la cité
Interrogé sur son rôle, Ernest Pignon-Ernest se défend d'être un homme politique. « Je suis membre d’un comité de soutien, je ne suis pas sur la liste, je ne suis pas candidat », précise-t-il clairement. Son objectif n'est pas d'obtenir un poste, mais d'utiliser sa notoriété pour mettre en lumière des enjeux qui lui semblent cruciaux pour l'avenir de Nice.
Il ne se voit pas comme une figure providentielle capable de « changer le cours des choses », mais simplement comme un citoyen engagé qui aime profondément sa ville. « Je connais Nice, j’aime Nice. J’ai toujours mon appartement au port », partage-t-il.
Plus largement, il s'inquiète d'un « processus de recul culturel » global, qu'il lie à un capitalisme basé sur le consumérisme. Citant Baudelaire, il rappelle que les poètes et les artistes ont souvent la capacité de « voir les problèmes venir avant les autres ». Pour lui, l'art n'est pas déconnecté des réalités politiques et sociales ; il en est au contraire un puissant révélateur.
En s'engageant dans cette campagne municipale, Ernest Pignon-Ernest reste fidèle à la démarche qui a guidé toute sa carrière : faire de l'espace public un lieu de dialogue, de réflexion et, parfois, d'indignation.





