Cinq mois après la fermeture temporaire de la rue Tiranty à Nice pour lutter contre la consommation de drogue en public, un calme apparent est revenu. Cependant, pour les riverains et les associations, le problème n'a pas disparu, il s'est simplement déplacé dans les rues adjacentes, soulevant des questions sur l'efficacité à long terme de cette mesure.
Points Clés
- La rue Tiranty est plus paisible depuis sa fermeture d'une semaine en juillet dernier.
- Les usagers de drogues se sont déplacés vers les rues voisines, notamment la rue Hancy.
- Des dispositifs mobiles d'aide et de réduction des risques ont été renforcés pour suivre ces populations.
- La capacité d'accueil en hébergement médicalisé reste limitée à 70 places pour l'ensemble de la ville.
Un apaisement en trompe-l'œil
En juillet dernier, une décision municipale avait conduit à la fermeture de la rue Tiranty pendant une semaine. L'objectif était clair : mettre fin aux scènes de consommation de stupéfiants qui exaspéraient les habitants et les commerçants du quartier. Aujourd'hui, le constat est partagé par beaucoup : la rue a retrouvé une certaine tranquillité.
Cependant, cette sérénité de façade cache une réalité plus complexe. Les personnes qui fréquentaient la rue Tiranty n'ont pas disparu. Elles se sont installées à quelques mètres de là, dans les rues avoisinantes. Le problème a été déplacé, mais non résolu, transformant d'autres secteurs du centre-ville en nouveaux points de fixation.
Le quotidien des rues adjacentes
La rue Hancy est devenue l'un des nouveaux lieux de rassemblement. C'est ici que le groupe SOS a positionné une de ses unités mobiles pour maintenir le contact avec ce public vulnérable. L'initiative, bien que nécessaire, confirme le déplacement du phénomène. Pour les acteurs de terrain, la fermeture d'une rue agit comme un pansement sur une plaie ouverte, sans traiter les causes profondes de l'addiction et de la précarité.
Le contexte de la mesure
La fermeture d'une semaine de la rue Tiranty s'inscrivait dans une politique de "tolérance zéro" face aux nuisances liées à la toxicomanie. Annoncée comme une action forte, elle visait à rassurer les résidents avant la saison estivale. La question de sa pérennité et de son impact global se pose désormais avec acuité.
Les dispositifs d'aide sur le terrain
Face à cette situation, les équipes spécialisées s'adaptent. Le Centre d’Accueil et d’Accompagnement à la Réduction des Risques pour les Usagers de Drogues (Caarud) et d'autres associations multiplient les interventions mobiles pour aller à la rencontre des personnes concernées. Ces unités sont essentielles pour fournir du matériel stérile, des soins de première nécessité et un soutien psychologique.
Isabelle, qui vit dans la rue depuis de nombreuses années, fréquente régulièrement ces points de contact. Elle explique l'importance de ce service :
"C'est vital pour nous. Ça me permet d'avoir du matériel propre pour éviter les infections et de parler à une infirmière si j'ai un problème. Sans eux, ce serait bien plus dangereux."
Son témoignage illustre le rôle crucial de ces structures de réduction des risques, qui créent un lien social et sanitaire indispensable avec une population souvent marginalisée.
Le planning des unités mobiles
Pour assurer une présence continue, les équipes mobiles se relaient dans différents points du centre-ville tout au long de la semaine, avec des horaires et des lieux précis pour être identifiables par les personnes qui en ont besoin.
- Lundi & Jeudi (matin) : Rue Hancy
- Mardi (après-midi) : Avenue de la Méditerranée
- Mercredi (matin) : Rue Fodéré
- Jeudi (après-midi) : Rue Émile Léonard
- Vendredi (matin) : Rue Georges Ville
Une offre d'hébergement sous tension
Au-delà de l'aide mobile, la question de l'hébergement reste centrale. Selon les autorités préfectorales, la ville de Nice dispose de deux centres d'hébergement dédiés aux personnes nécessitant une prise en charge médicale, pour un total de seulement 70 places.
Ce chiffre apparaît faible au regard des besoins sur le terrain. Les associations soulignent que sans une solution de logement stable et un accompagnement médico-social adapté, il est extrêmement difficile pour une personne de sortir de la spirale de l'addiction et de la précarité. Les unités mobiles, bien qu'essentielles, ne peuvent se substituer à une politique structurelle de prise en charge.
Quelle stratégie à long terme ?
La situation post-Tiranty met en lumière les limites d'une approche purement sécuritaire. Si la tranquillité d'une rue a été restaurée, le problème de santé publique et social demeure entier. Le déplacement des usagers ne fait que reporter la difficulté sur d'autres quartiers et rend le travail des équipes de soutien plus complexe.
Les professionnels du secteur plaident pour une stratégie globale qui combinerait prévention, réduction des risques, accès aux soins et solutions d'hébergement pérennes. La fermeture ponctuelle d'un lieu, si elle peut répondre à une urgence et à une demande locale, ne saurait constituer une solution durable pour accompagner les personnes les plus vulnérables et assurer la cohésion sociale dans la ville.





